La stratégie de la coopération française pour promouvoir ses positions en matière de foncier

La stratégie de la coopération française pour promouvoir ses positions en matière de foncier

le 14/09/2015

A l’issue d’un chantier de réflexion de trois ans sur le thème « transparence et négociation des contrats », initié par l’Agence Française de Développement (AFD), le Comité technique « Foncier et développement » (CTFD) a abouti à une série d’études et d’ouvrages, parmi lesquels un Guide d’analyse ex ante des projets d’investissements agricoles à emprise foncière. Ce chantier était motivé par un souci de rendre opérationnel différents principes internationaux relatifs à la gouvernance foncière responsable. Ce travail a déjà été présenté auprès des acteurs français et lors de conférences internationales organisées par l’Union Africaine et la Banque Mondiale. Le MAEDI et l’AFD entendent aujourd’hui poursuivre la valorisation de ce travail et les positionnements qui en découlent, par une stratégie qui s’articule en trois axes :

1/ Le portage des positions françaises auprès des autres bailleurs internationaux

La coopération française est d’ores et déjà engagée à plusieurs niveaux, notamment par sa participation à au Global Donor Working Group on Land (GDWGL), groupe des bailleurs internationaux travaillant sur le foncier, dont elle assurera la co-présidence avec l’USAID à compter d’octobre 2015. Réunissant 38 bailleurs de fonds (bailleurs bilatéraux et multilatéraux, IFI, agences de développement, etc.), la plateforme est une instance privilégiée de débats et de diffusion de messages.

Par ailleurs, à l’initiative de la France, avec l’appui du GDWGL et du Fida, un atelier réunissant bailleurs internationaux, ONG et secteur privé, aura lieu le 13 octobre à Rome. Cette rencontre a pour objectif de réfléchir aux modalités de mise en application des Directives Volontaires pour une Gouvernance responsable des régimes fonciers de la FAO (2012), dans les opérations de développement financées par l’aide internationale. Les échanges tourneront autour de trois expériences d’application, qui aideront à tirer des enseignements pour les acteurs du secteur : le MAEDI y présentera un exemple d’application du Guide d’analyse ex ante à un projet d’extension de plantations d’hévéa au Ghana, financé par l’AFD et Proparco. Quant au Fida, il interviendra sur les modalités d’intégration des Directives Volontaires dans les partenariats qu’il aide à mettre en place, entre petits agriculteurs et investisseurs. Une 3ème intervention est attendue de la part du secteur privé.

2/ L’intégration de ces recommandations dans les diligences sociales et environnementales de l’AFD

Le groupe AFD a d’ores et déjà commencé à utiliser ce guide pour plusieurs projets d’investissement agricole qu’il finance (au Ghana, au Cambodge avec un projet d’agriculture contractuelle concernant la culture du curcuma, etc). Le groupe vise, à terme, l’intégration dans ses procédures internes des diligences foncières proposées dans le guide, y compris pour sa filiale Proparco, dédiée au financement du secteur privé. Ce travail pourra également permettre d’accompagner la réflexion d’autres partenaires techniques et financiers. Cette dynamique s’inscrit dans la lignée de l’engagement pris lors du dernier sommet du G7 à ce que l’ensemble des projets soutenus par l’aide au développement respectent les principes des Directives Volontaires pour une Gouvernance responsable des régimes fonciers.

3/  La promotion de ces principes d’investissement responsable auprès des investisseurs et entrepreneurs français

Au-delà du travail mené en interne et avec les partenaires au développement, la Coopération française souhaite aussi promouvoir un dialogue avec les investisseurs et entrepreneurs français pour présenter le positionnement de la France en matière de reconnaissance des droits fonciers des populations et d’investissement agricole responsable. Une table ronde avec des représentants d’entreprises françaises devrait être organisée avant la fin de l’année.

La coopération française s’investit donc auprès de ses partenaires internationaux afin de promouvoir ses positions sur les questions foncières. Cette stratégie résulte parfois sur la mise en place d’initiatives conjointes entre les bailleurs. Le dernier exemple de cette collaboration entre les bailleurs est une déclaration commune de soutien à la prise en compte d’un indicateur foncier pour les Objectifs du Développement Durable (ODD).

Cette prise de position commune des bailleurs (explicité dans un policy brief) vient en réponse à une première proposition d’indicateur foncier, concernant le pourcentage de femmes propriétaires parmi les agriculteurs. Jugé trop restrictif, porteur d’un fort biais propriétariste, la GLII a élaboré un indicateur qui se veut plus global. Il  s’agit du pourcentage de femmes, d’hommes, de peuples autochtones et de communautés locales disposant de droits sécurisés sur la terre et les ressources naturelles, mesuré par :

  • le pourcentage de personnes détentrices d’une preuve de leur occupation, légalement reconnue ou formalisée
  • le pourcentage de personnes qui considèrent que leurs droits sont reconnus et protégés[1]

[1] : Dans le texte, “percentage of women, men, indigenous peoples, and local communities (IPLCs) with secure rights to land, property, and natural resources, measured by : (i) percentage with legally documented or recognized evidence of tenure, and (ii) percentage who perceive their rights are recognized and protected