Chantier « structures agraires et accès des jeunes à la terre »: point d’étape

Chantier « structures agraires et accès des jeunes à la terre »: point d’étape

le 27/08/2018

Dans de nombreux pays engagés dans une transition démo-économique, notamment en Afrique sub-saharienne, la question de l’emploi des jeunes est au cœur des enjeux de développement. Les décennies à venir se traduiront en effet par une croissance continue du nombre de jeunes actifs entrant sur le marché du travail chaque année, jusqu’au dernier pic de transition démographique prévu dans les années 2050. Face à ce défi immense, le secteur agricole reste dans de nombreuses régions du monde le premier secteur pourvoyeur d’emplois durables. De la production primaire à la transformation d’une grande diversité de produits alimentaires et non alimentaires, le secteur agricole fournit et continuera de fournir un grand nombre d’emplois réguliers (permanents ou saisonniers). La question du développement de l’agriculture, et plus largement, des territoires ruraux demeure donc primordiale.

Afin d’apporter des clés d’analyses permettant de mieux appréhender cette question cruciale de l’insertion et l’autonomisation des jeunes ruraux, le Comité technique « Foncier & développement » a organisé, dans le courant du premier semestre 2018, une série de séminaires qui s’inscrivent dans le cadre d’un chantier de réflexion collective autour des trajectoires d’évolution des systèmes agraires et de l’accès des jeunes à la terre.

Ce chantier vise à comprendre sous quels angles le foncier, aux côtés des autres moyens de production, constitue une condition déterminante d’entrée des jeunes ruraux dans l’agriculture. Il a pour objectif général de produire un cadre d’analyse permettant de faciliter le dialogue et la prise de décision entre acteurs des politiques foncières et des politiques agricoles, au niveau national, et en lien avec la communauté internationale.

De manière plus spécifique, il vise à :

  • Proposer un cadre d’analyse des modalités de gouvernance locale et des instruments de politique foncière agricole permettant de créer un environnement favorable à la mise en place de structures agraires fondées sur des exploitations agricoles durables assurant le renouvellement des générations et favorisant l’insertion économique des jeunes ruraux, notamment via la sécurisation de leurs droits d’usage et la limitation de la concentration foncière
  • Analyser les facteurs (sociaux, politiques, économiques, environnementaux), notamment le rôle joué par le foncier dans les recompositions territoriales, impactant directement l’accès des jeunes à la terre. Il s’agit ici de comprendre les pratiques et logiques d’acteurs, relevant souvent de l’informel, qui impactent sur l’évolution des exploitations agricoles et la place que les jeunes y occupent. Les questions liées aux articulations entre la mobilité des jeunes (migrations de travail, de colonisation agraire, etc.) et leurs stratégies d’ancrage sur l’exploitation feront l’objet d’une attention particulière.

Lancé en octobre 2017, ce chantier est animé par Agter et Scafr-Terres d’Europe et mobilise les membres du Comité, ainsi que différents intervenants issus de la recherche et du monde du développement (OP, ONG, agents de la coopération française).

 

Séminaires de travail

Un premier séminaire, organisé en janvier dernier, était consacré à l’Europe, et a permis de faire ressortir les éléments clés du contexte économique, social et environnemental qui ont influencé l’évolution des structures agricoles sur le temps long, en Europe, et plus particulièrement en France, en Angleterre et en Allemagne (note de synthèse n°26, à consulter ici.).

En avril dernier, l’exercice a été prolongé sur le continent américain, sur la base d’une analyse continentale de l’évolution des structures agraires, et plus spécifiquement du rôle des politiques foncières dans ces évolutions. Ce travail a été étayé par des études de cas mexicaines, brésiliennes et colombiennes. Finalement, deux autres journées de travail ont été organisées en juin, pour poursuivre l’exercice sur le continent asiatique et africain (Chine, Inde, Indonésie, Angola, Algérie).

En parallèle de ces journées, un Appel à Contributions a été lancé, en février, autour des modalités d’installation des jeunes en milieu rural (agricole et non agricole), afin de mieux comprendre les stratégies d’installation dans différents contextes, et de documenter les initiatives, publiques ou non, qui existent en la matière.

Les propositions reçues ont été analysées, et une dizaine de contributions ont été sélectionnées : elles ont été présentées lors de deux journées d’étude, le 3 et le 4 juillet dernier, dans le cadre de 3 sessions thématiques : (i) : l’organisation intrafamiliale de l’accès au foncier (ii) Marchés fonciers et autonomisation des jeunes (iii) l’installation des jeunes dans le cadre de programmes publics. Les contributions seront publiées dans la revue « Regards sur le foncier » à paraître prochainement.

Premiers résultats

Ces différentes rencontres ont mis en avant le besoin de déconstruire un certain nombre de stéréotypes qui existent sur la jeunesse et le monde rural (chômage et violence, chômage et migration, etc.), et de reconstruire une vision « par le bas », c’est-à-dire à partir d’une connaissance actualisée des dynamiques locales. Elles ont également permis d’avancer sur l’identification d’une série de portes d’entrée pertinentes pour analyser et favoriser le renouvellement des exploitations familiales et l’insertion économique des jeunes, notamment :

  • L’entrée par la famille: par exemple, quelles sont les stratégies des groupes familiaux, et des différentes générations en leur sein, pour faire face aux besoins du groupe et se renouveler ?
  • L’entrée par les différents systèmes d’exploitation familiaux: par exemple, dans quelle mesure peuvent-ils jouer leur rôle économique [revenu, alimentation], environnemental [gestion des ressources naturelles] et social [faire face aux chocs, protéger les anciens, les personnes non valides, etc, ?) dans un contexte donné ?
  • L’entrée par le territoire: quelles sont les opportunités économiques dans le secteur agricole ou dans d’autres secteurs qui favorisent l’autonomisation des jeunes ? Comment s’articulent les trajectoires de vie de ces jeunes, entre leur territoire d’attache familial et leurs potentielles zones de migration ?

Le chantier se poursuivra jusqu’à la fin de l’année 2018, avec une prochaine réunion prévue en octobre, qui permettra de valider la grille d’analyse élaborée collectivement au fil des séances.