Violent conflit foncier au nord-Togo

le 01/07/2019

Deux morts, une dizaine de blessés, cinquante maisons incendiées… C’est le triste bilan d’un affrontement sanglant survenu jeudi dernier entre deux communautés au nord-Togo (préfecture de l’Oti).

Il s’agit des communautés Gangan et Tchokossi, peuple guerrier d’après les historiens de l’Université de Lomé, et qui depuis très longtemps, portent des griefs liés à l’occupation des riches terres agricoles.

Selon le ministre togolais de la sécurité, originaire de la région, Yark Damehane, les violences ont éclaté jeudi, quand les « Gangan ont attaqué les Tchokossi, en train de cultiver sur leur parcelle, après une décision de justice autorisant les deux parties à poursuivre temporairement leurs activités ».

La suite, on l’a connaît. Les affrontements ont atteint plusieurs villages avec des habitations incendiées.

« Une trentaine de jeunes instigateurs ont été interpellés et seront présentés au procureur », informe le gouvernement.

Une crise aux origines lointaines

Selon plusieurs analystes, ce litige devenu plus récurrent relève plutôt d’une « affaire du vivre ensemble entre les communautés de cette région, peuple purement guerrier ».

Certains expliquent que « les Tchokossi ont été traumatisés déjà par l’installation de la faune dans la région au temps du feu président Gnassingbé Eyadema ». « Ils ont perdu une fois des terres pour créer la faune et ne sont plus prêts à perdre. Et on sait qu’ils ont subi ce sentiment de ne plus rien perdre », pensent –t-ils.

« C’est un peu comme les premières et deuxièmes guerres mondiales. Il y a des mésententes et chacun se retient jusqu’à ce qu’un jour, un événement vienne déclencher tout et il s’en suit des règlements de compte juste aux anciens évènements », comparent les observateurs avisés.

Une résolution axée sur le dialogue

Pour résoudre cette crise, certains proposent à l’Etat d’adopter une approche traditionnelle de résolution des conflits. « L’Etat peut mener une médiation dans le sens à créer un comité conjoint de gestion de cette zone de terres de telles sortes que les revenus tirés de cette terre puissent être équitablement distribués », conseillent –ils.

« Seul le dialogue entre sages des deux communautés peut aider à décanter cette situation. A l’issue de ce dialogue aboutira un accord de gestion de la zone de terres et ceci va sonner le glas », avance un enseignant-chercheur d’Université au Sénégal, interrogé par agridigitale.

L’autre option envisageable est celle qu’utilisent les parents, à savoir si deux enfants se battent pour un jouet, le papa récupère le jouet et ni l’un ni l’autre ne l’a. « Si la première approche de dialogue échoue. L’Etat peut récupérer le jouet comme c’est le cas au Rwanda », suggèrent d’autres chercheurs sur la question foncière.

Si l’Etat gérait le foncier ?  

Ce serait de l’avis de beaucoup, la fin des ennuis liés au foncier au Togo. Le problème à la base est que l’Etat ne soit pas détenteur du foncier. « Si la terre appartenait à l’Etat, nul n’aura le droit de vendre ou de mettre en bail les terres. Actuellement, l’Etat s’y met en dépoussiérant les vieux codes coloniaux. C’est déjà un pas », reconnaissent-ils.

En attendant que des solutions durables soient trouvées à cette crise foncière, les populations qui s’installent en terres étrangères pourraient toutefois éviter de se comporter comme les propriétaires terriens.

Source : Agridigitale via le Land Portal