Avec la fin de l’apartheid et l’élection de Nelson Mandela à la présidence de la République, une page a été tournée en Afrique du Sud. Dans le domaine agricole, l’ensemble de la population rurale noire avait été rassemblé de force sur 13 % seulement du territoire national, les homelands, réservant ainsi 87 % de l’espace disponible aux seuls agriculteurs blancs. Comment corriger de telles inégalités héritées du passé ? Soucieux de ne pas désorganiser le secteur agricole, alors considéré comme modernisé et productif, les nouveaux dirigeants firent le choix de mettre en œuvre une réforme agraire « assistée par le marché ». Plutôt que de redistribuer la terre (et l’eau d’irrigation) en faveur du plus grand nombre, ce qui aurait nécessité l’expropriation des propriétaires favorisés par l’ancien régime, il s’agissait de promouvoir un marché foncier censé permettre aux Noirs d’accéder progressivement à la terre par le processus « libre vendeur, libre acheteur».
En s’appuyant sur l’étude approfondie des transformations agricoles et foncières de quelques régions agricoles contrastées, ce livre tente de faire le bilan de cette expérience. Le constat est sans appel. Vingt ans après, la structure foncière demeure presque inchangée, reflet d’un modèle de développement agricole lui-même non remis en question. Sans une remise en cause de cette agriculture « entrepreneuriale » spécialisée, hautement consommatrice d’énergie fossile et d’intrants de synthèse, et reposant largement sur l’emploi salarié, une répartition plus équitable des ressources et de la valeur ajoutée ne sera guère possible.
Rejoignez-nous sur
LinkedIn X Facebook