Burkina Faso

Documenter et mettre en débat les dynamiques et enjeux de politique foncière dans le contexte de la crise socio-politique et sécuritaire au Burkina Faso

Depuis 2019, le Comité technique « Foncier et développement », présidé par le Ministère de l’Europe et des Affaires Etrangères et l’Agence Française de Développement appuie des réseaux d’acteurs stratégiques sur les réformes foncières dans 7 pays d’Afrique de l’Ouest (Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Guinée, Mali, Niger, Sénégal) et à Madagascar.

Le foncier au Burkina Faso est régi par plusieurs lois et documents politiques dont la Loi 034-2009 portant régime foncier rural. Cette dernière apporte une grande innovation dans la reconnaissance officielle des droits coutumiers et a été saluée pour son processus d’élaboration qualifié d’exemplaire car issu de longues phases de concertation avec toutes les parties prenantes au niveau national et régional (voir en particulier la Fiche Pays Burkina Faso et les notes de synthèse des journées organisées sur la situation foncière au Burkina : note de synthèse n°36 et note de synthèse n°15).

La loi 034-2009 se heurte cependant à de nombreuses difficultés d’opérationnalisation, parmi lesquelles : (i) une politisation des structures locales de gestion foncière source de conflits et de tensions entre les différentes composantes des sociétés locales ; (ii) une mise en place des structures de la loi dépendante des projets et des bailleurs de fonds internationaux, avec des enjeux forts de pérennisation des agents des Services fonciers ruraux (SFR) ; ou encore (iii) la difficulté pour les communes de formaliser leur domaine. A cela s’ajoute la montée de l’insécurité liée à l’extrémisme violent ces derniers années qui a des conséquences sans précédent dans les territoires (déplacements forcés, délocalisation des autorités et reconfiguration de la gouvernance des territoires, montée des trafics, communautarisation des violences, perte d’accès aux moyens de production, crise humanitaire, accélération de la marchandisation de la terre, instabilité socio-politique, etc.), avec des implications fortes sur les dynamiques foncières et leur gouvernance.

Face à ces enjeux, les actions soutenues par le Comité au Burkina Faso ont été axées sur la documentation de problématiques clefs pour mieux comprendre les dynamiques en cours dans les territoires et ses implications pour les politiques foncières. Elles sont le fruit de concertations conduites avec les acteurs stratégiques du foncier à partir de 2019.

Atelier sur les trajectoires des politiques foncières au Burkina Faso

En juin 2019, le CTFD a appuyé la Direction générale du Foncier, de la Formation, et de l’Organisation du Monde Rural (DGFOMR), la Confédération paysanne du Faso (CPF), le Groupe de Recherche et d’Action sur le Foncier (GRAF) dans l’organisation d’un atelier de réflexion sur les trajectoires des politiques foncières au Burkina Faso. Cet atelier a permis d’identifier un ensemble d’initiatives susceptibles d’être accompagnées par le CTFD visant à renforcer la qualité de la participation de la société civile burkinabè dans le suivi de la mise en œuvre de la politique nationale de sécurisation foncière en milieu rural et de la législation sur le foncier d’une part et dans les débats sur la gouvernance foncière au Burkina Faso et Afrique de l’Ouest d’autre part. Les actes de cet atelier sont accessibles sur le Portail.

Les initiatives identifiées ont été précisées à partir de 2020 avec l’appui du GRAF. Après une suspension des travaux liés à la pandémie mondiale de la COVID 19, un atelier de cadrage des initiatives a été organisé en juin 2021 avec des experts nationaux et des représentants d’OSC parties prenantes à l’atelier de 2019. Deux propositions ont été finalement retenues dans ce cadre.

Etude sur les impacts des modes de consommation des espaces périurbains sur les systèmes de production et la sécurité alimentaire

Cette étude portée par le GRAF (lead), la CPF et l’Association pour la promotion de l’élevage au Sahel et en savane (APESS) vise à produire et mettre en débat des connaissances sur les impacts des modes de consommation des espaces périurbains sur les systèmes de production et la sécurité alimentaire. L’objectif est plus particulièrement de : (i) Produire un état des lieux actualisé des acquisitions foncières autour des villes du Burkina Faso à partir des cas des deux grandes métropoles (Ouagadougou et Bobo-Dioulasso) et de deux villes moyennes affectées ou non par les conséquences de la crise sécuritaire ; (ii) Analyser le rôle de ces acquisitions foncières dans les transformations des rapports fonciers dans les territoires périurbains ; (iii) Analyser l’impact de ces transformations foncières sur les modes de production dans les territoires périurbains et leur contribution à la sécurité alimentaire ; et (iv) Alimenter les débats en cours sur les politiques publiques au niveau national.

Etude sur les implications de la montée des violences dans les territoires sur les dynamiques foncières et leurs enjeux de régulation

Une seconde étude conduite par la CPF et la Plateforme Multi-Acteurs sur le Foncier (PMAF) vise à produire et mettre en débat des connaissances permettant de mieux comprendre les implications de la montée des violences dans les territoires sur les dynamiques foncières et leurs enjeux de régulation dans le cadre des instances prévues par la loi 034-2009.

De manière spécifique il s’agira de : (i) Mettre en évidence les processus de montée en violence des conflits fonciers et le cas échéant leurs liens et articulations éventuels avec les insurrections djihadistes ; (ii) Mettre en évidence et analyser les tensions/conflits fonciers dans les territoires et les enjeux de régulation en contexte de crise et en temps de paix ; (iii) Mettre en lumière le rôle de chacun des acteurs intervenant aujourd’hui dans la régulation des conflits, interroger leur légitimité, la pertinence de leurs outils et modes de régulation et mettre en exergue les bouleversements induits par la situation de crise ; et (iv) Analyser l’incidence des conflits fonciers sur le vivre ensemble, la cohésion sociale dans des contextes régionaux, national et sous régional marqués par l’extrémisme violent et le terrorisme ;

Les résultats de ces deux études seront par la suite discutés et mis en débat avec un panel d’acteurs stratégiques du foncier au Burkina avec pour objectif d’identifier des recommandations pour alimenter les réflexions sur l’opérationnalisation de loi foncière et en identifier les ajustements nécessaires dans le contexte actuel.