Ethiopie
Depuis plus d’un siècle, le système agraire éthiopien connaît des difficultés structurelles considérables. L’Ethiopie est un pays dont l’économie est dominée par le secteur primaire : plus de 80% de la population se trouve en zone rurale et tire ses revenus de la terre. Cependant, la plus grande partie des exploitations agricoles ne parviennent pas à atteindre le seuil de pauvreté. Les inégalités foncières se creusent, faisant ainsi émerger une classe de paysans sans terres, touchant en grande partie les jeunes.
L’accès à la terre et son contrôle a toujours constitué un enjeu primordial dans la construction sociale et politique du pays. Sous l’Ancien régime, la terre a pendant longtemps été utilisée par les dirigeants comme un moyen de fidéliser leur entourage et de consolider leur assise sur l’ensemble du territoire. De nombreuses faveurs étaient ainsi accordées à certaines catégories sociales, notamment à l’Eglise, à l’armée et à la noblesse, renforçant ainsi les inégalités sociales et régionales quant à l’accès à la terre.
L’arrivée du régime communiste en 1974 a conduit à d’importants changements dans la gestion foncière. Les réformes agraires visent dans un premier temps la nationalisation des terres, puis leur collectivisation à partir de 1979. Les paysans qui en font la demande peuvent accéder via des associations paysannes à des droits d’usages sur des terres, mais qu’ils ne peuvent ni vendre, ni louer. En l’espace d’un siècle, les bases de la gestion du foncier ont radicalement changé mais la prégnance des différences régionales s’est conservée dans les rapports avec le pouvoir en place. Ce manque d’uniformité territoriale constitue encore aujourd’hui l’un des éléments caractéristiques de la situation foncière en Ethiopie.
Les régions où les droits des populations sont les plus faibles et où les ressources en eau sont facilement accessibles font également l’objet depuis plusieurs années d’acquisitions massives de terres par des investisseurs étrangers. Ce phénomène se développe sous l’impulsion forte du gouvernement, qui affiche une politique offensive auprès des investisseurs, alors que les conditions d’accès aux terres demeurent peu transparentes, les consultations avec les communautés locales limitées et que les compensations ne sont souvent pas versées.