
Burkina Faso
La gestion du foncier au Burkina Faso est régie par plusieurs lois et documents politiques dont les principaux sont la loi de Réorganisation agraire et foncière (qui date de 1984 et a été réactualisée en 2012), la Politique nationale de sécurisation foncière en milieu rural (PNSFMR) et plus récemment la loi 034-2009 portant régime foncier rural. La grande innovation de cette nouvelle loi est qu’elle reconnaît officiellement les droits coutumiers (qui peuvent être formalisés via des attestations de possession foncière et des accords de prêts) et transfère la gestion du foncier aux communes rurales. Elle offre aussi des outils intéressant de gestion des ressources naturelles à travers les chartes foncières locales, qui résultent de négociations entre populations locales et peuvent désormais être reconnues officiellement par les services de l’Etat et les collectivités locales. La domanialité est abandonnée et le domaine foncier est désormais divisé en trois domaines distincts : le domaine de l’Etat, le domaine des particuliers et le domaine des collectivités.
Bien qu’exemplaire dans son processus d’élaboration (la loi est issue de longues phases de concertation avec toutes les parties prenantes au niveau national et régional) et dans les outils qu’elle propose, la loi 034-2009 se heurte cependant à de nombreuses difficultés d’opérationnalisation. Elle intervient tout d’abord dans un contexte particulier de décentralisation récente (2006), où la liaison est forte entre appartenance à un parti politique et exercice des prérogatives d’élu local. De plus, toutes les dispositions de la loi ne font pas consensus, à l’instar de l’article 36, qui précise les modalités d’obtention des attestations de possession foncière et en exclut les migrants (qui ne sont pas reconnus comme détenteurs traditionnels de la terre, quelle que soit la durée depuis laquelle ils la mettent en valeur). Or au Burkina Faso, l’accueil de migrants a joué un rôle central dans l’aménagement du territoire et a permis dans les années 80 aux populations Mossi de migrer vers l’Ouest dans des zones où la pression était moindre que sur le plateau central.
Enfin, la loi se trouve confrontée à une sorte d’inachèvement juridique. Les nombreuses institutions communales et villageoises prévues pour gérer le foncier n’ont pas encore été mises en place, les documents juridiques permettant de mettre en œuvre la loi ne sont pas encore prêts, les fonds nécessaires au niveau national n’ont pas été prévus non plus par l’Etat. Aujourd’hui, la mise en œuvre de la loi semble donc conditionnée à l’arrivée de projets dans les différentes régions du pays et dotés des financements nécessaires, avec tous les risques de décrochage de certaines régions et d’absence de coordination que cela implique, mais plus encore, de renversement de hiérarchie entre intervenants externes et services de l’Etat burkinabé, si celui-ci n’assume pas correctement son rôle de maître d’œuvre principal.